Le sacré

"Ce qui peut être véritablement religieux ou sacré, c'est un certain état d'esprit, tel celui décrit par Lutèce consistant à "pouvoir regarder toutes choses avec l'esprit en paix," ou encore, autrement exprimé, c'est l'esprit silencieux, ouvert, attentif, plein d'amour ou de compassion; mais ce n'est jamais l'esprit étroit, rempli de croyances, de superstitions, de haine de l'autre faisant pendant à l'amour de Dieu, d'attentes enfantines de récompenses après la mort, comme s'affiche trop souvent l'esprit du croyant. L'esprit religieux n'est pas l'esprit croyant mais l'esprit attentif.  Ce dernier remet en question toutes les croyances, percevant leur fausseté et leur danger, au profit d'un esprit qui ne croit ni ne sait, qui demeure donc ouvert et apprend sans cesse.

Grâce à l'attention, l'esprit se vide de son contenu ou de son conditionnement.  De cette manière, il demeure jeune, se renouvelle, s'étonne, s'émerveille; il est vivant, curieux, à l'affût. Il reste en contact avec le mystère du monde.  Le sacré ou le divin est l'inconnu même, autant celui du monde que celui de l'esprit en contact avec le monde.  Cela n'a selon nous rien à voir avec les dogmes, les rituels et les croyances." (Bernard, Pierre. L'intelligence du corps, Éditions Liber, Montréal, 2004, page 198)